LASNAMIA

BOUYA, PHIL, TONTON ET LES VOLEURS DE TIMBRE( Le Chelif du 12/8/2015

 

 PASSION

BOUYA, PHIL, TONTON ET LES VOLEURS DE TIMBRE

 

C' était une journée orageuse à ne pas mettre un pauvre facteur dehors.Ce jour de fête postale là, au salon philatélique de la ville de "makacheles-timbres", était triste et monotone.L'absence des visiteurs a fini par envahir de tristesse les collectionneurs qui ont dévoilé pourtantun riche patrimoine philatélique à l'occasion de cet événement et qui a rassemblé une partie des collectionneurs du pays. Le hall du salon où étaient dressées les longues colonnes de panneaux côte-à-côte, était agrémenté par de riches et belles collections postales exposées pour la circonstance. L'endroit était mal éclairé, seule une faible lumière permettait de distinguer les belles images. Un air de musique postale accompagne cette journée d'expo organisée sous le slogan de "KoulOutlaFihaKheir" (tout retard a ses bienfaits). Et comme à chaque rencontre coutumière dans ces salons de la philatélie, chacun vaquait à ses occupations postales devant ses panneaux timbrés. Echanges et ventes ce premier jour battaient le plein. Les quelques visiteurs présents admirent silencieusement les thé- matiques présentées. Les rares amateurs de ce loisir se comptaient sur les doigtsd'une main en cet après-midi hivernale. La plupart des philatélistes étaient rassemblés autour d'une grande table de décharge remplie de planches de timbres et d'enveloppes illustrées qui passaient de main en main et qui se négociaient dans un grand brouhaha de chineurs de souk. Soudain, la porte d'entrée principale de la salle d'expo s'ouvre brusquement sur une bande de "w'hid" cagoulés tenant dans la main des albums bien chargés qu'ils pointaient sur les visiteurs et les philatélistes présents. Le chef de cette bande transparente cria sourdement au milieu de la salle à notre attention : "Levez les enveloppes en l'air et déposez les timbres par terre, si vous tenez à la philatélie précaire !" Tout le monde s'exécuta, déchargea son album et le jeta au pied des panneaux. Le sol était couvert d'albums et de timbres postaux éparpilles et mêlé à des cartes maximums en couleurs. La personne qui semblait être le chef s'avança tout près des panneaux suivis de ses acolytes pour ramasser le précieux butin. Ils étaient moches et pas beaux à voir, surtout le chef qui avait une bouche édentée. Les autres n'avaient rien àenvier à leur chef, ils avaient tous une tête-bêche oblitérée. D'une voix grave, il ordonna aux exposants de faire un pas en arrière avec les mains derrière le dos et chacun devant son panneau. Ensuite, sur un ton sévère de vieux postier grincheux, il nous a prévenus :"Si quelqu'un essaye de jouer au plus malin, je lui perfore la peau des timbres et je lui signe son document FDC !",lança-t-il à l'adresse des "timbrés". Et puis il s'avança tout près de Bouya, le vieux philatéliste, avec un petit sourire du coin daté de la bouche. Il lui dit :"Où sont les autres?", en le fixant bien dans le blanc des yeux avec sa loupe optique. Bouya lui ré- pondit :"De qui parlez-vous ? De vos vieux émis !", lui dit-il. "Mais je n'ai pas de vieux amis ici! Ils sont tous à Mascara, je vous le jure !",supplia Bouya tout en tremblant. "Ne fait pas le malin toi le Maaskri, sinon, je te décote la valeur de tes timbres !" Le bandit brandi alors son album en l'air chargé de timbres oblitérés et non oblité- rés,le pointa sur la tempe de Bouyaet menaça de le lui vider dans sa boite postale s'il n'avouait pas où il cachait le prestigieux timbre légendaire surnommait le "1+9". Bouya, sous le coup de la surprise,demeurait silencieux et muet comme une carte philatélique invendue. Voyant alors que Bouya ne voulait pas parler et faisait la forte effigie, le bandit, pris d'un accès de colère et fou de rage, d'un geste prompt, fit surgir de sa poche, comme une flamme, un timbre à date jailli dans le poing droit qu'il apposa lourdement sur le front de Bouyalequel tomba raide comme une planche de timbres à la renverse, assommé par l'empreinte "Premier jour" affichée sur le frontal. Manel, le philatéliste qui était juste àcôté, se précipita rapidement pour aider son ami à se relever et lui apporter les premiers soins. Bouya était toujours étendu sur le sol sonné et gommé par le coup du tampon. Le chef de bande était toujours là, debout,qui éternuait à répétition.Son nez coulait, il semblait être enrhumé. Il prit alors, sur la table une pleine poignée de timbres, se moucha avec et les jeta ensuite aux pieds du pauvre Bouya. S'adressant à Manel qui était accroupi àcôté de Bouya, il lui dit : "Toi, je te connais ! J'ai vu ta tête quelque part, mais je ne sais où", dit-il avec une mine qui en disait long sur sa rancœur. Intervenant à son tour, un autre bandit s'écria :"Ça y'est chef, je me rappelle, il a toute une bibliothèque de timbres sur Internet celui-là! Il est plein de timbres sûrement." "Montre-moi cette rareté !", ordonna le chef à Manel. "Je te jure chef, que je ne l'ai pas ramené avec moi, je l'ai laissé avec mes autres timbres à Oran",jura sur ses timbres Manel. Convaincu, mais décidé quand même à ne pas repartir "blech" (bredouille) de cette fête du timbre, quoi qu'il soit, le chef de bande se dirigea ensuite à l'extrémité des panneaux toujours accompagné de ses compères timbrés.Et là, il se trouva en face de deux autres philatélistes, Phil et son ami Tonton premier, qui étaient assis au bout de la chaîne et qui regardaient la scène dramatique qui se déroulait devant leurs yeux à laquelle était confronté le malchanceux Bouya. "C'est lui, chef ! Je le reconnais !", cria un autre bandit en désignant du doigt Phil. "Il en connaît beaucoup de choses celui-là sur le 1+9, et même sur tout le Congo et son fleuve qui le traverse". "Tu sais, chef, ils sont bizarres ces deux timbrés-là lorsqu'ils discutent du 1+9 ensemble… Et sincèrement, je ne comprends que dalle sur tout ce qu'ils disent à propos du 1+9, surtout lorsqu'ils parlent de variétés, de drapeaux, du fleuve Congo et du croissant décalé, de perlesetc. C'est vrai qu'ils sont un peu mabouls, ces collectionneurs Ils cherchent des poux dans la tête du timbre." Le chef interrompt son ami et tend la main ouverte en direction de Phil en lui disant : "Aboule la marchandise si tu ne veux pas goûter au timbre à date." Phil marqua un temps d'arrêt avant de s'exécuter, il fixa longuement son interlocuteur avant de prendre dans sa sacoche une petite enveloppe qu'il ouvrit nerveusement et d'où il retira à l'aide d'une pince le premier timbre Algérien après l'indépendance,un timbre historique de couleur verte émis à l'occasion du 8ème anniversaire de la révolution et surnommé aussi "1+9". Le chef de bande tout content le prit entre les doigts et le montra à ses amis qui se bousculèrent pour le voir de près. Ensuite, il le glissa soigneusement au milieu de sa carte d'identité et héla ses compagnons de la main, les invitant à le suivre dehors. Sitôt la bande de "W'hid" sortie de la salle, tout le monde se précipita au chevet de Bouya qui était toujours allongé sur le sol quelque peu sonné, mais bien ré- veillé. Gentleman, Tonton et les autres étaient tous courbés sur le corps de leur ami allongé pour l'assister et le réconforter après cette terrible agression postale. Timidement Bouya, dit à Phil d'une voix fragile et secouée : "Il ne faut pas te faire trop de bile et de peine pour le regretté "1+9",khouya! Après tout, ce n'est qu'un timbre-poste Et comme on dit, un de perdu, neuf de retrouvés Inchallah!" Phil, fixa son ami des yeux longuement avec un petit sourire et lui dit :"Bouya, tu vaux plus que ça à nos yeux!"

H. D. *Philatéliste

-Hawid : bande ou support de timbres.

-FDC : Enveloppe illustrée.

-Timbres se tenant : Deux timbres nonséparés.

-1+9 : Premier timbre de l'Algérie indépendante

BOUYA, PHIL, TONTON ET LES VOLEURS DE TIMBRE



17/08/2015
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