LASNAMIA

Des pêches et des coings (Lez Quotidien d'Oran le 10/7/2016)

 
 
 
Des pêches et des coings
 
 

par Hamid Dahmani

 

 

 

Les gens sont pleins d'énergie et d'idées au milieu de cette époque mi-pêche mi-coing. Ils ont la pêche. Ils aiment dialoguer et papoter, pour passer le temps et s'exprimer sur les déboires de la vie. On converse partout, du petit matin à la tombée de la nuit pour occuper son temps à prêcher dans le désert. Partout dans les cafés, dans la rue, sur les bancs publics, on cause sur les sujets politiques qui font le grand débat dans le présent. Pour palabrer, on choisit ses amis et la bonne compagnie pour échanger les vues et les penchants. De nos jours, les pêches et les coings ne sont pas mis dans le même panier. L'expression qui les vante va bon train, et ne va pas par quatre chemins pour énoncer clairement «Rouh chouf ziyek !» (Va voir tes semblables), ou bien «Elhadra m'aa el khoukh, ama s'fendjer khenek ! ». (La discussion est avec les pêches, car les coings sont étouffants), disent les grands messieurs qui apprécient la pertinence. Un proverbe au goût des fruits de saisons pour mettre l'accent sur la préférence. Une formule qui fait la part des choses et qui remet en place certains individus impertinents. La pêche a du succès. C'est un fruit attirant et très apprécié pour son délice. Il est savoureux et plein de douceurs, de senteurs et rempli de pur jus. La pêche passe facilement et agréablement dans le palais et le gosier. Tandis que le coing a la chair dure et granuleuse quand on le consomme cru. Et il provoque une sensation d'assèchement de la bouche quant on le mâche. Deux fruits opposés dans un proverbe pour une bonne morale. C'est vrai que converser avec des gens sages et intelligents est un instant mielleux comme le goût de la pêche, contrairement aux débits de paroles des insuffisants et des passables, aplaties comme de la gelée de coings. J'écoute attentivement mon pote le financier quand il cause avec pertinence sur la mauvaise gouvernance et les scandales sur l'argent public détourné et distribué aux tire-au-flanc. Et je boude mon voisin le naïf quand il me parle de sa page facebook et des vidéos partagées sur le football et les talentueux joueurs étrangers qui amassent des milliards. Il me rappelle l'expression qui lui va si bien, « être bourré comme un coing ». Dans ses moments de vie politique unique et inique, on se fend la pêche, sur le fonctionnement ridicule des rouages du pays. Le discours est devenu indigeste comme les coings qui ne sont pas bio. Les arbres du cognassier ont envahi le territoire. Et les délicieuses pêches ont disparu des étals. Le coing est le fruit résistant du cognassier qui a pris le relais pour remplacer la pêche. Les coings ne sont pas très conseillés pour les manger crus. Les coings ne font pas bonne recette. Ils sont affectionnés uniquement pour faire de la marmelade. Dans le présent, il y a des gens délicieux qu'on envie comme des pêches quand ils communiquent, alors que d'autres, coriaces, nous irritent avec leurs caractères insupportables de petits prétentieux. 

Untel «h'lou kima el khoukh, ou sahbou bassel kima s'fendjer fel foum». Les discours ennuyeux et les discussions lassantes sont comparés et assimilés au goût et à la saveur du repoussant coing. Lorsque l'on ne veut pas répondre à la provocation et la polémique verbale, les plus sages disent que «el hadra maa el khoukh, ama s'fendjer khanek», pour signifier par cette réflexion que le débat est perdu d'avance avec les titulaires de la langue de bois et des médiocres. Les pêches font le bon dessert de la table. Quant aux coings, on est assuré de rester sur notre faim, parce qu'il n'y a pas de baraka


10/07/2016
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