LASNAMIA

La pénurie, un vrai casse-tête. ( Le Quotidien d'Oran du 30/4/2015)

 

 
 
 
 
La pénurie, un vrai casse-tête
 
 
 
 

par Hamid Dahmani

 

 

 

Les pénuries colorées du pays sont ponctuelles cette année comme les hirondelles qui annoncent le beau printemps. Elles sont revenues après une petite absence dans notre cité urbaine. 

Elles envahissent chaque jour nos quartiers, nos marchés, nos stations et nos administrations avec leurs chaînes et leurs files interminables pour nous agacer et nous faire tirer la langue. Les files sont longues et lentes et se faufilent sur des centaines de mètres et se perdent dans le dédale des quartiers, du petit matin à la tombée de la nuit. Je suis en panne sèche et le carburant manque terriblement à mon auto. Il est peut-être temps de se mettre au vélo. Ma tête est remplie de préoccupations et d'obsession et mon réservoir a besoin de benzine. C'est une véritable hémiplégie pour l'économie du pays. Ces pénuries sont bariolées aux couleurs de l'insuffisance et de l'incompétence des grands chefs qui jouent le rôle de supers génies. Etudes fortuites et prévisions précaires pour faire fonctionner les rouages d'une économie délétère avec une burette. On ne gère pas une entreprise d'une telle envergure comme Naftal avec une légèreté récurrente de la rupture des stocks de carburants comme on gère un moulin traditionnel. La crise du manque de carburant est un véritable casse-tête pour le citoyen. 

Fiouls, carburants et butanes sont les mamelles de notre mère bénie la pénurie. Les citernes sont à sec et le moral au plus bas. Ma voiture est en panne. La foire aux pénuries fait la furie chez les chauffeurs de bus et les automobilistes émotionnés. C'est la fête de l'incurie et du désordre déclenchée par la passivité et le laisser-aller au sein de l'entreprise chargée de nous approvisionner. C'est une situation de carence et de mauvaise gestion qui échappe à la bonne gouvernance. « Sur ma route, il y a de la move, oui de l'aventure dans l'movie… ». Avant-hier, j'ai été victime d'une panne idiote. Alors que je circulais joyeusement avec les enfants, mon moteur a toussé et fait un brusque mouvement d'avance et de recul et rendu l'âme avec un bruit de fin d'énergie « teuf, teuf, teuf... ». 

Pas d'essence du tout ! Avec ou sans plomb pour ma bagnole qui fait le piquet de grève devant la pompe. Ma voiture est nerveuse et n'en fait qu'à sa tête et ne veut pas rouler si je ne lui refile pas du bon carburant dans le réservoir. J'ai passé la nuit devant la pompe à guetter le camion-citerne de carburant pour faire le plein mais en vain. Cette semaine aussi, je n'ai pas mangé de frites parce que les patates se font désirer et les prix se sont envolés dans les marchés populaires. Mon épicier m'a signifié avec un petit sourire un niet pour un sachet de lait. « Aandou bezef ma djeche ! », me murmura à l'oreille l'épicier. « Quelle vacherie ! » Toutes ces pénuries cachent une grande vérité qui ne dit pas son nom. 

L'essence s'est évaporée des stations et les pistolets de distribution sont restés dégainés sans tirer pendant la semaine. C'est la dèche et la sieste dans les stations. Le deuxième jour de la pénurie, je me suis présenté à la station avec un jerrican de 20 litres à la main devant le pompiste qui grillait une sèche à côté du distributeur. « C'est à quel sujet, me dit-il ? » « C'est pour un porte-clés pour enrichir ma collection, s'il en reste, s'il vous plait ! ». J'adore Naftal ! 

Cette chronique est une vieille chanson du répertoire des pénuries lassantes d'un pays très fatigué qui nous gonfle… de colère. L'essence est un carburant et une énergie pour faire tourner les mécaniques, mais pas les idées dans les cerveaux qui guident le pays. «Koul outla fiha kheir !». 

Laisse tomber le problème des pénuries mon frère et au diable les railleries et les pleurnicheries, les commentaires abrutis, l'anarchie qui gangrène la société et apaise-toi sur ton destin. Bientôt la fin du cauchemar et bonjour le wifi avec l'essence par Internet. Et puis, ne dit-on pas «win ma el-hague lessence yenfaa !» Nous avons des gisements et des puits qui débordent de pétrole, nous répètent nos zélés hommes politiques à chaque mauvaise occasion qui se présente. «Tu parles !» L'Algérie est un grand pays doté de potentialités énormes et qui pourra affronter tous les défis tissés par la main de l'étranger, nous rabâchent à chaque fois les moulins à voix. « Pauvre Algérie, qu'as-tu fait de tes enfants ? ». 


30/04/2015
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