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Le web et la grammaire(Le Quotidien d'Oran du 04/3/2017)

 
Le web et la grammaire
 

par Hamid Dahmani

 

Les réseaux sociaux fonctionnent à plein régime, mais pas comme il se doit. On ne reconnaît plus le jour de la nuit quand on est en face de son PC. Les murs électroniques sont pris d'assaut et l'expression des internautes déborde d'imagination pour faire exploser le tempérament. Une nouvelle race de passionnées est née avec l'ère électronique pour donner de la voix. On s'exprime par des textes, des images et des vidéos pour animer les pages. En sillonnant les espaces du web, on est frappé par la bataille de la communication et de la vie citoyenne qui a fait un grand pas en avant durant cette dernière décennie. Les murs et les espaces sont peints de toutes les couleurs et chacun y va de son commentaire. 

On s'exprime comme on peut pour attirer plus de visiteurs. Crier au changement est un credo à la mode sur Internet. Le web est une providence pour les épris de la liberté et de la démocratie. La voix électronique est devenue un moyen de lutte, d'expression, de dénonciation et de militantisme contre le déni. 

Les jeunes internautes d'aujourd'hui aiment la Toile et la technologie salvatrice. L'heure est au changement. La nouvelle génération fouille et chatte à tout moment, et navigue sur le web pendant des nuits blanches. Il est temps pour la pensée ringarde de changer ses idées. L'outil électronique est apparu pour changer la donne. Aujourd'hui les internautes militent dans leurs propres espaces libres pour un meilleur avenir, loin des «lidjenes et kasmates chaabia». Facebook «a'mhainek» est un mercenaire gracieux au service des peuples. Youtube c'est plein les yeux de vidéos marrantes qui fâchent l'autorité. 

En naviguant l'autre jour sur les flots d'internet, j'ai lu un drôle de commentaire d'un visiteur qui a fait la remarque suivante à son auteur : «de grâce respectez la syntaxe et l'orthographe dans votre texte, sur internet». Je me suis demandé dans la tête «Malou hadha?» (Qu'es-ce qu'il a celui là ?). Une observation chouia petite et arrogante. 

Il faut souligner qu'on croise souvent dans la rue ou sur internet cette espèce prétentieuse qui joue le rôle de donneur de leçons. Une expression inopportune qui froisse les sentiments des plus fragiles. On se demande, depuis quand doit-on prendre des gants et faire attention à sa phraséologie et spécialement sa syntaxe pour parler ou dénoncer l'injustice, les abus, la corruption et tous les autres maux qui gangrènent le quotidien des Algériens ? Et depuis quand l'écriture ou la lecture sont-elles uniquement réservées aux plus brillants de la société ? Faut-il avoir la juste phrase pour manifester sa colère et envoyer quelqu'un sur les roses ? Sommes-nous tenus de faire dans la dentelle pour communiquer avec notre prochain ? Ha, sacrée syntaxe, quand tu nous tiens. Il y a des gens injustes, qui ne sont pas très droits pour affronter les pires situations mais trouvent un malin plaisir à défléchir leurs remarques sur des affaires courantes et banales de notre malheureuse société. 

«Mahgourti ya marti» (ma femme est la victime de ma furie) est une expression populaire pour crier à l'injustice. Les gueulards ne remarquent pas la syntaxe et l'orthographe balancée par nos hommes politiques qui baragouinent au jour le jour dans des discours stériles dans la langue de Molière et de celle d'Al-Mutanabbî, sans que cela ne soulève le tollé de ces défenseurs de la belle phrase. Chercher des poux dans la tête de quelqu'un est un acte mesquin des improductifs qui ne font rien de leurs dix doigts et qui voient plein de fautes chez les plus productifs. Chez ces zélés le verbe est court et n'apporte pas de l'eau au moulin. On s'arrête et on exploite bêtement des détails minuscules de circonstances. Ces brillants «professeurs» ne voient pas le fond du problème, mais simplement sa forme. On aime se faire distinguer et épater la galerie. «Choufouni ya ness» je connais ma grammaire mieux que cet idiot qui a soulevé un problème avec plein de fautes. La marginalisation n'a jamais été une idée constructrice au sein d'une société. Et puis quoi encore ? On n'a pas le droit de s'éclater et de faire des fautes comme tout le monde ? 


04/03/2017
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