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Pour un dispositif intégrant les banques et les entreprises Par : M’hamed Abaci * Quotidien Liberté

ContributionsSamedi, 28 Septembre 2013 09:50Facebook Imprimer Envoyer Réagir

Réduction de la facture des importations et lutte contre la fuite des capitaux

Pour un dispositif intégrant les banques et les entreprises

Par : M’hamed Abaci *

Il n’est pas normal dans une économie de marché qu’on fasse appel aux fonds publics pour financer le commerce ou les entreprises à caractère industriel et commercial, voire les clubs sportifs professionnels. 

Le commerce d’importation est au centre d’une préoccupation majeure du gouvernement. En effet, tout dernièrement, le Premier ministre Abdelmalek Sellal avait demandé au ministre des Finances de prendre toutes les mesures nécessaires devant la gravité de la hausse de la facture des importations et la fuite des capitaux, et fait état d’un record des transferts de devises de l’Algérie vers l’étranger, s’expliquant par sa volonté de réduire la facture des importations qui peut atteindre le cap des 60 milliards de dollars en 2013, soit près de 80% de nos recettes annuelles des hydrocarbures. 
Pour rappel, l’évolution de nos importations passant de 6 milliards de dollars en 1970 à 14 milliards de dollars en 1990 pour atteindre 48 milliards de dollars en 2012. D’où on parle du retour de l’autorisation d’importation envisagée, selon la presse, par les pouvoirs publics en vue de réduire le niveau des importations et le transfert des capitaux vers l’étranger. Ceci devrait normalement inciter à ouvrir un débat de “spécialistes-médecins de l’économie” à l’imagination féconde, car recourir à cette procédure appelée à l’époque AGI (autorisation globale d’importation) n’est pas une nouveauté en soi puisqu’elle a été instaurée pour rappel au cours des années 1970. Elle est du ressort exclusif de l’état ; elle est délivrée par le ministère du Commerce pour ouvrir droit à un transfert domicilié auprès d’une banque publique dans le cadre d’une économie planifiée, alors qu’aujourd’hui, nous sommes dans une économie de marché où on doit reconnaître que l’économie est d’abord une stratégie d’entreprise où chaque entreprise a ses spécificités et doit par conséquent développer son mode de stratégie de développement économique, orienté par les règles et les mécanismes de marché. Face à cette gravité en question, la meilleure riposte est de libérer l’entreprise et relancer l’investissement productif, débarrassé des contraintes bureaucratiques, dans le souci d’une plus grande efficacité économique.
Dans cette mission particulière de l’état d’apporter les changements, on s’interroge du rôle et de la place de nos banques dans le financement de l’économie : sont-elles à bout de souffle devant la gravité de l’expansion du commerce de l’importation aux dépens de l’exportation, lorsque l’on sait près de 70% de nos revenus provenant de la rente pétrolière en devises fortes financent les importations, et que près de 45% de la masse monétaire est dans les circuits du commerce informel et par conséquent échappe à nos banques ? Elles sont censées s’adapter avec les outils du management moderne telles que les techniques bancaires, l’ingénierie financière et l’intelligence économique, de manière à surveiller le niveau de confiance et à maîtriser l’évolution économique et financière des agents économiques, dont notamment les importateurs, afin d’évaluer de manière tous risques et par voie de conséquence le développement du commerce extérieur dans la croissance et le contrôle des flux financiers vers l’étranger en relation avec les exportations et les importations. Il semble désormais établi que, si le financement via les banques publiques n’évolue pas, on peut craindre la grande crise économique et sociale du pays, sachant que 90% de crédits relèvent des banques publiques. Il y a donc nécessite de s’interroger  pour une meilleure appréhension de cette nouvelle mesure sur le commerce extérieur, afin d’améliorer et de fructifier les réserves de changes, au moment où nos importateurs ne jouent aucun rôle à l’international, pour que les importations soient un relais de croissance et d’être également des acteurs dans l’exportation et le développement économique.
Voilà un signe révélateur d’une situation qui soulève un problème sérieux dans la gestion économique et financière du pays, où l’état semble vouloir cerner ce problème à travers la réduction des importations. Alors que nous n’avons ni économie politique ni stratégies d’entreprises. C’est à ce niveau-là que réside la véritable problématique du recours irrationnel au commerce de l’importation et à la rente pétrolière au détriment des valeurs du travail et des compétences (VH).
Nous sommes bien obligés de constater, une nouvelle fois, qu’on n’a pas réussi à faire émerger une économie de production, même après avoir institué le Crédoc par la loi de finances complémentaire 2009 ferme et non révisable, avec comme objectif de promouvoir la production nationale. En somme, rien d’extraordinaire  pour libérer le pays de la forte dépendance d’un système économique et budgétaire par rapport aux hydrocarbures.
Cela met en avant de grandes questions sur l’apport du commerce de l’importation dans la vie économique et sociale du pays. 
Que doit-on financer : l’usine ou le kiwi ? 
Existe-t-il réellement une offre nationale de substitution qui pourrait faire face aujourd’hui à la réduction des importations ou notre dépendance vis-à-vis de l’extérieur ? 
Combien sont-ils les importateurs dotés d’une vraie organisation managériale ?
On peut retenir de ce qui précède que ces instructions du Premier ministre ont leurs limites, dans la mesure où, d’une part, nos banques ne jouent pas encore le jeu en ce qui concerne surtout les impératifs du commerce extérieur pour espérer construire une économie moins dépendante de la rente pétrolière, et d’autre part nos importateurs ne jouent aucun rôle à l’international pour que les importations soient un relais de croissance. Par ailleurs, on note l’avènement de milliers d’importateurs sur la base d’un simple registre du commerce aux dépens des règles du jeu de l’économie de marché et d’une économie diversifiée. On a exporté 2 milliards de dollars hors hydrocarbures contre 48 milliards de dollars en importation en 2012. Nos revenus provenant de la rente pétrolière financent nos importations dont un peu plus de 50% sont composées de matières premières, pièces et équipements industriels, destinés au fonctionnement de nos entreprises. Ce qui aggrave le déséquilibre de notre balance commerciale et notre balance de paiements, donc susceptible de surévaluer davantage nos importations et le coût des investissements sans rentabilité économique, notamment pour un meilleur rapport entre importations et croissance, puisque l’entreprise en économie de marché doit exporter plus et produire au moindre coût possible. Faut-il alors parler d’importations mal contrôlées, mal maîtrisées, surévaluées ou secondaires ? 
On imagine donc les conséquences économiques, financières et sociales sur l’Algérie après-pétrole ou sans subventions. Cela souligne l’urgente nécessité pour l’Algérie de se doter d’un nouveau système de gouvernance et de gestion des entreprises et des banques qui développe de nouveaux mécanismes de la microéconomique pour stimuler l’économie aux investisseurs (IDE). Car, il faut le dire, et c’est très important, il n’est pas normal dans une économie de marché qu’on fasse appel aux fonds publics pour financer le commerce ou les  entreprises à caractère industriel et commercial, voire les clubs sportifs professionnels. 
C’est bien l’heure de marquer une nouvelle génération de réformes économiques et financières qui va permettre aux banques et aux entreprises de jouer pleinement un rôle plus responsable dans le monde économique. Gérer une entreprise,  c’est surtout créer, innover et développer en termes d’avantages économiques en plus de l’acte de  produire. Pour cela, la réforme de l’entreprise s’impose en conformité du droit commercial. L’aspect pénal de l’acte de gestion est encore contraignant et ouvre la porte à toutes les interprétations possibles, notamment  les deux poids, deux mesures (code de commerce/code des marchés publics/circulaires…) avec pour conséquences fâcheuses le blocage de l’initiative et l’inefficacité économique. 
On ne doit donc soumettre l’entreprise et son environnement à une instrumentation juridique ou procédurale de droit public trop forte. L’économie ne se décrète pas, elle se fait et se développe avec les cerveaux et les bras, notamment avec l’action, la stratégie, la vision, la forte personnalité. Plus on accélère les règles et les mécanismes de l’économie de marché, plus on donne aux entreprises, aux banques et aux importateurs les grandes possibilités d’évoluer en croissance, en investissements et en partenariat.  

Quel bénéfice peut-on en tirer ?
En partageant, ainsi, les raisons et les préoccupations, le commerce extérieur constitue un atout de taille pour notre pays où on aura tout à gagner d’une bonne politique de croissance externe, car nous demeurons toujours une petite économie sachant que nos exportations hors  hydrocarbures ne dépassent pas les 2%. Dès lors, les importations seront à notre humble avis, un transfert de richesses liées à la production de biens et de services dans notre pays, amenant  une prospérité matérielle au profit  des agents économiques et des ménages. Exemple : à une époque, le Japon importait des voitures russes reconnues pour leur qualité supérieure en tôle, non pas pour les besoins de leur marché en revente en l’état, mais tout simplement destinées pour la re-transformation, et l’entreprise japonaise produisait l’équivalent de deux à trois véhicules.
On voit bien au regard de l’impact et la nécessité de développer une stratégie du commerce extérieur en appui à la promotion de la production nationale et son développement au plan technologique. En guise de propositions, il serait judicieux d’engager la réflexion sur “l’importation sans paiement”, ce qui veut tout simplement dire n’ouvre pas droit au transfert sur l’étranger, stimuler la notion de “concessionnaire en statut de filiales” dont l’impact est éminemment de souveraineté économique et monétaire quand on sait que les réserves de changes provenant en totalité de la rente des hydrocarbures et nos importateurs ne sont pas encore exportateurs, par conséquent, ils n’assurent pas de revenus en devises au pays et ne disposent pas également de budgets ou de comptes devises à caractère commercial. L’idée est discutable surtout si elle s’applique aux produits spéculatifs ou secondaires. Par ailleurs, elle s’avère d’une mesure compatible avec la liberté du commerce et la démocratie économique et plus important encore fait réduire la facture des importations, lutter contre le transfert illicite de capitaux et par conséquent s’assurer d’un gain en devises  supplémentaire sur nos réserves de changes. Néanmoins, il y a un certain ordre à mettre en place dont un schéma institutionnel qui doit être couronné par la création d’un ministère ou un secrétariat d’Etat qui vise l’accompagnement et l’encadrement de l’ouverture de notre commerce extérieur, notamment nos importateurs doivent s’insérer dans la division du travail à l’échelle internationale et dans laquelle doivent  percer des domaines nouveaux, notamment se constituer une force en matière d’intelligence économique, de techniques de négociation et de stratégie. L’amélioration du climat des affaires pour l’accès au commerce extérieur commandera le traitement des importations et des importateurs relèvera de l’organisation structurelle commerciale, garantie d’une saine gestion et de contrôle sur lequel reposera notre système des échanges internationaux, des transferts et d’orientation import/export, ce qui contribuera au contrôle de l’informel lié au trabendo alimenté par le commerce extérieur, à la promotion des exportations, à initier la mise en œuvre des budgets devises et à réduire les distorsions dans le système bancaire. En plus de l’exonération des droits et taxes sur les produits subventionnés et l’accès au financement de leurs importations sur les réserves de changes  dont nos importateurs bénéficient en Algérie, il y a lieu, également, de s’interroger sur les trois R obtenus (rabais, remises et ristournes) sur les transactions commerciales dont les importateurs doivent normalement bénéficier de la part de leurs fournisseurs étrangers : sont-ils comptabilisés et figurant en déduction sur les factures commerciales lors de la domiciliation bancaire ? 
L’important est donc de convertir nos importations dans le sens des  parts de marchés et créer de nouvelles valeurs d’activités économiques et commerciales à l’économie nationale, mais les importateurs doivent adopter désormais une approche de management.


M. A.
(*)Financier et auteur de deux ouvrages :
Comptabilité des sociétés  et Gouvernance des entreprises 
mhamedabaci@yahoo.fr



29/09/2013
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