LASNAMIA

Du menu fretin ( Le Quotidien d'Oran du 25/7/2016)

 

 
 
 
Du menu fretin

 

 

par Hamid Dahmani

 

 

«Les apparences sont souvent trompeuses» ou bien «Hadhek ghir khoudhra foug taâm», sont deux expressions qui vont dans le même sens pour décrier une situation de diversion. Quand on parle de quelqu'un d'insignifiant, qui fait fonction de responsable, dans une organisation hiérarchique, il y a cette expression de chez nous qui le désigne avec dédain et qui dit : «Hadhek ghir khoudhra foug taam ziyada ! » (Celui-là n'est qu'un décor sur le plat de couscous en plus), pour affirmer que l'individu visé n'est qu'une manœuvre et un faux-semblant dans le schéma de la responsabilité. Une expression très usité chez nous et qui veut dire que la personne désignée n'est qu'un figurant dérisoire, dans le dispositif de la responsabilité, et que derrière elle, il y a une grosse légume qui tire les ficelles. 

Contrairement, dans la préparation du couscous, tous les ingrédients ou «khodhra» (légumes) ont leur importance. Les légumes sont déterminants pour la réussite du plat et de sa saveur. Pour faire du bon couscous, il faut une «guedra et un keskes» (un couscoussier) et une «ghelaga » (bouche-trou) qui va rendre hermétique le couscoussier. 

Pour se régaler, il faut une bonne zerda de couscous. Et pour se lécher les babines, il faut manger du couscous maison de maman ou de la grande tante. C'est un délice que de se remplir la panse et faire bombance avec un plat de couscous roulé avec de la bonne semoule, ornée de légumes et de viande. 

En vérité, ce sont les succulents légumes qui le composent et qui vont avec, qui font généralement la réussite du plat de couscous. Il faut savoir et bien le souligner qu'un plat de «T'aam, kesksou, ou berboucha» (couscous) composé uniquement de semoule sans ingrédients est insuffisant et n'est pas très appétissant pour les papilles. «El-khodhra» sur t'aam, c'est beau et alléchant, même pour les yeux. Il existe plusieurs variantes de la recette et on peut consommer son couscous (blech) sans accompagnement, l'arroser avec du lait, du leben, du beurre, du miel ou du café au lait…selon les humeurs culinaires de chacun. Tous ces ingrédients cités dans la composition du «maach» sont indispensables pour la réussite du bon couscous de chez nous, on ne doit pas sous-estimer cette «khodhra foug taam » reniée par le dicton populaire. 

Mais ce qui tarabuste l'esprit le plus, ce n'est pas le couscous et sa préparation, c'est ce dicton populaire et sa signification négative qui nuit à la garniture du plat de couscous. 

Entre le dicton et la recette, il y a une mêlée de «légumes» et de quoi pédaler dans le couscous. Pourquoi avoir fait le parallèle entre l'insignifiant et le plat de couscous bien garni ? 

L'autre jour, un ami m'a sollicité pour un coup de pouce pour une formalité administrative en souffrance dans une boite. Je lui ai recommandé un copain de vieille date qui travaille dans cette boite en lui disant : «Vas voir flène, de ma part, il prendra soin de toi !» Il m'a répondu avec dédain ; « Hedhek z'yada ! ghi khodhra foug taam, bark !». Celui-là, ce n'est que du menu fretin seulement dans cet établissement. 


25/07/2016
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