Histoire de salades-Le Chélif du 12/01/22
Journal Le Chélif du 12/01/22
Terroir
Histoire de salades.
Par Hamid Dahmani
Manger sa salade verte sans les ingrédients essentiels à sa réussite donne une saveur culinaire fade à ce mets léger. Généralement, la salade improvisée et mal assaisonnée n’est pas très appréciée par ceux qui affectionnent la bonne table à cause de son arrière-goût désagréable. Les gens expérimentés n’aiment pas qu’on les force à ingurgiter des histoires de salades dans ces moments ahurissants, alors qu’on parle de plats consistants. C’est fou ce que les gens prennent leurs semblables pour des caves ou des demeurés dans le simple souci de leur vendre leur salade impropre et indigeste, très mauvaise aussi pour leur santé, aux heures de grande écoute. Ma belle-mère ne se prive pas dans l’art de faire avaler des couleuvres à ses convives, elle a en sus une bonne recette pour faire bouffer à ses invités, avec le sourire bien entendu, sa salade insipide et immangeable. «Koul, wallah la klite ! T’hasbek !» (Mange, pardieu que tu mangeras, sinon tu le regretteras). Dans ma vie potagère, j’ai mangé à toutes les salades de chez nous, «bessif». «Chlada», frisée ou scarole accompagnée de tranches de concombres, de tomates et quelques olives et ainsi de suite depuis que je suis en vie. Je vis de salade en salade en attendant mon dernier soupir dans un champ de salades. Aussi avec le temps, j’ai appris beaucoup de choses sur les affaires de salades et de paniers à salades. J’ai une grande horreur des mauvais paniers à salades, et je n’aime pas la salade préparée hâtivement au dernier moment comme dans une gargote malfamée. On dit qu’avec le temps la salade se dessèche et prend une couleur de rouille, elle devient ainsi impropre à la consommation et très mauvaise pour les boyaux. C’est bon de manger de la salade nourrissante, mais c’est très mauvais de raconter des histoires de salades pourries en ces moments de pénuries. Quand les supermenteurs sont pris au mot, ils commencent à vendre des salades d’un autre temps pour dérouter les bonnes gens. Les mauvais cuistots se plaignent toujours de la mauvaise qualité de la laitue de trois ou quatre jours présentée dans un piteux saladier ébréché. C’est vraiment débile de prêter l’oreille aux salades débitées sans mesures par les langues de bois durant les longues soirées. Il parait, selon une étude médicale, qu’il n’est pas conseillé de manger de salade pendant que des bons à rien nous racontent des histoires de salades ratées. Un proverbe dit ceci : « Pour bien faire la salade, il faut être quatre : un avare pour y mettre le vinaigre, un prodigue pour l'huile, pour le sel, un sage et pour la remuer un fou ! »
H. D.
