LASNAMIA

L'argent perdu d' EL-ASNAM

L'argent perdu d'El Asnam

- Le dossier des détournements de fonds qui ont suivi la destruction par un tremblement de terre en octobre 1980 de la ville d'El Asnam, en Algérie, est resté longtemps englué dans les méandres de la procédure pénale. En 1988, une plainte est déposée auprès du doyen des juges d'instruction de Nanterre. Partie civile, l'Etat algérien demande alors à la justice française d'enquêter sur les «escroqueries, corruptions de fonctionnaires et trafic d'influence» qui auraient eu lieu, à partir de la France, lors des travaux de reconstruction de la ville. Pour l'Algérie, une partie des sommes débloquées par la France aurait été détournée pour aboutir sur des comptes bancaires suisses, après un détour par des sociétés écrans basées à Panama, Djibouti, Beyrouth et Londres. Plusieurs dizaines de millions de francs se seraient évaporées, une partie ayant été versée en espèces en Suisse à des intermédiaires qui se sont évanouis dans la nature.

Un an et demi après le dépôt de la plainte, le magistrat de Nanterre rend une ordonnance de non-lieu. L'Etat algérien fait appel et, en mai 1990, la chambre d'accusation de Versailles ordonne un supplément d'information avant que son président ne se saisisse du dossier au mois de janvier 1994. Depuis, l'enquête est au point mort mais les éléments recueillis durant les premières investigations ont permis de commencer à débrouiller les fils de cette étrange opération franco-algérienne.

En 1980, après la catastrophe, la France, pour des raisons historiques, humanitaires, mais surtout commerciales, avait emporté le marché de la reconstruction de la ville. Le financement en avait été confié à la Banque française du commerce extérieur (BFCE), alors dirigée par François Giscard d'Estaing, le frère du président de la République de l'époque. Quant à la réalisation des travaux, elle avait été attribuée à la société Gradient, un groupe dont l'actionnaire principal était Thierry Roussel, neveu du PDG du groupe Roussel-Uclaf et plus versé dans la communication ou la promotion que dans le bâtiment.

Autour des réelles sociétés de travaux publics apparaîssent une floraison de sociétés écrans. Le mécanisme de cette opération est apparu en 1984, lorsque l'une des entreprises, la Seal Baticlub, dirigée par Thierry Roussel, dépose son bilan. On se rend alors compte qu'elle vient de transférer une somme de 7,9 millions de francs sur un compte suisse ouvert au nom de la société Niblan, domiciliée à Panama. Les premières investigations vont révéler une intense circulation de capitaux, mais ne parviennent pas à découvrir l'identité des bénéficiaires: si les banquiers et notaires suisses reconnaissent avoir versé plus de 2 millions de francs français et plus de 1 million de francs suisses à des intermédiaires, ils refusent de dévoiler leurs identités.

Une partie de cet argent a certainement servi à corrompre des fonctionnaires algériens, mais une partie est sans doute revenue en France où elle aurait été utilisée pour le financement de campagnes électorales. Seule la poursuite de l'information judiciaire aurait pu permettre de connaître la vérité et de déterminer le rôle de Thierry Roussel, dont l'agence de communication était réputée pour avoir des liens avec Giscard. Mais le dossier n'est pas clos, car la justice suisse vient à son tour de se lancer dans la bataille.

Francis ZAMPONI

lien/http://www.liberation.fr/france/0101130633-l-argent-perdu-d-el-asnam



09/05/2010
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